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Dossier Les tables d'exception : Anne-Sophie PIC, Valence

 

La Maison PIC à Valence, puis la table d'Anne-Sophie PIC au Beau rivage Palace à Lausanne inaugurent la série dédiée aux tables d'exception en France et en Europe...car les étoiles sont parfois, elles aussi, dans les assiettes.

 

 

 

 

 

 

Maison Pic Valence,

Quand la cuisine se fait sensorielle...

 

Cuisine & Vins / Menu Collection : 9.5/10

Cadre/ architecte d'intérieur : Bruno Borrione : 5/5

Service : 4.5/5

Numéro de table lors de la visite  : R1

 

 

NOTE GLOBALE & avis personnel

19/20


 

 

 

 

Certains grands chefs ont besoin d'un chapeau étrange pour marquer leur identité, d'autres animent des émissions culinaires, et d'autres encore entretiennent le flambeau familial, l'âme d'une maison...

On choisira aujourd'hui la troisième option, pour parler d'Anne-Sophie PIC et de sa cuisine, apprise en autodidacte, par volonté et suite aux hasards de la vie, alors que son parcours la destinait davantage aux directions marketing et financières de grands groupes internationaux.

Loin des chiffres et des plans marketing, elle dirige aujourd'hui la maison familiale PIC qui existe à Valence depuis le XIXème siècle.

L'héritage pourrait être lourd : imaginez une maison qui perd et gagne des étoiles, la réputation d'un plat, la comparaison avec les prédécesseurs ou encore,  sa propre identité qui se noie dans le giron familial.

Anne-Sophie Pic, semble loin de tout ça, son prénom maintenant fait partie de la dynastie, et au regard de son talent, très certainement pour longtemps.

L'histoire en a connu des chefs au féminin louées par le  guide rouge :  Eugénie Brazier et Marie Bourgeois en 1933 ainsi que Marguerite Bise en 1951.

Mais il aura fallu attendre plus de  50 ans  pour qu'une femme s'impose de nouveau sur le devant de la scène de la haute cuisine avec 3 étoiles.

La même année d'ailleurs que Frédéric Anton pour le Pré Catelan, et Yannick Alleno pour le Meurice.

 

Et que raconte cette cuisine ?

 

Avant de passer à l'assiette, arrêtons nous un instant sur le lieu, narratif, qui crée et invente lui aussi l'histoire.

Le cadre de la salle de restaurant et le parcours qui y mène, tout semble pensé et étudié pour qu'on perde rapidement pied et qu'on se laisse guider. Des photos accrochées aux murs dévoilent les anciennes générations qui ont bâti l'histoire de la maison.

Les lustres touchent presque le sol, lui même marqué par des lignes topographiques, des tours et des détours graphiques.

Les murs boisés répondent aux miroirs et aux parois de verre qui séparent les espaces.

La lumière contrôlée n'éclaire que le centre de la table pour que le regard se concentre sur l'assiette.

Le design floral, quasi minimaliste, parachève l'atmosphère, née de courbes, de rondeurs et de douceurs.

Cristal de Baccarat pour les verres...on les soulève comme des calices, prêt à s'offrir ce voyage stellaire.

 

 

Avant d'arriver dans la salle, la carte aura été consultée dans les salons, la commande passée, et on sait déjà à quoi on doit s'attendre.

Le choix aura été cornélien, la carte fourmille, parle de Collection, d'Actualités...et l'envie et l'attention se portent sur tellement d'intitulés.

On fait appel à des origines : le boeuf est de Salers, le caviar d'Aquitaine, et la sole de petits bateaux.

Tout crie fraîcheur, abstraction et simplicité éternelle, et s'impose sur la carte comme une évidence.

Ce pouvoir de porter aux nues un produit de qualité, de le magnifier avec deux ou trois autres ingrédients et d'écrire au final une partition qui offrirait moult double croches à entendre. Un travail que l'on sent déjà d'une précision millimétrée.

 

Le choix s'est finalement porté sur le menu Collection, hommage tant aux plats qui ont créé la renommée de la maison qu' à l'impulsion créative qu'Anne-Sophie Pic a su lui donner depuis.

En voici le déroulé :

 

L'AMUSE BOUCHE

 

LES PETITS LÉGUMES DE NOS PRODUCTEURS
LE PARMIGIANO REGGIANO, LA TRUFFE D’ETE

coulant de Parmigiano Reggiano sur une tarte fine sablée à la lavande
étuvée de petits légumes au vinaigre de Xérès

 

LE HOMARD BLEU
rôti doucement au beurre de crustacés
consommé de homard aux baies et fruits rouges
légèrement aromatisé au poivre vert

 

LE BAR DE LIGNE AU CAVIAR D’AQUITAINE
comme l’aimait mon Père -1971-

 

LA POULARDE DE BRESSE
le suprême rôti au poêlon, marmelade de citron étuvée de jeunes blettes et couteaux

 

LE SAINT FÉLICIEN CRÉMEUX
relevé au poivre de Voatsiperifery, compotée de cerises au sucre noir

 

L’INTEMPOREL SOUFFLÉ CHAUD AU GRAND MARNIER

 

LA FRAISE DE PAYS
à l’anis vert, pur jus de fraises émulsionné, moelleux d’une guimauve

 

 


 

7 plats donc, que le sommelier nous conseille adroitement d'accompagner d'un Condrieu blanc Chery Niero 2008, parfait accord pour relever  le fondant du parmesan, les crustacés et le poisson et renforcer le moelleux de la volaille de Bresse. 

Un verre de Côte rôtie sur le Saint Félicien et le plateau de fromages.

Un verre de Muscat Beaumes de Venise pour terminer sur la note sucrée du Soufflé au Grand Marnier et les fraises.

 

 

L'eau de Chateldon pétille déjà dans les verres, quand le premier plat arrive.

Une composition axée sur les textures : le croquant des légumes, le feuilleté de la pâte (la touche de lavande est très abstraite), le côté terreux et puissant de la truffe blanche et soudain comme une déferlante, le crémeux et la force du parmesan qui rehaussent et signent magistralement le plat.

On se plait à mélanger, à faire fondre, à combiner les trois éléments ensemble. Le gras du feuilletage répond au gras du parmesan, le croquant des légumes résiste, et la truffe s'impose en finesse.

L'approche gustative, à la lecture de la carte, aurait pu sembler douteuse. Il n'en est rien.  On s'installe, dès maintenant, dans un état d'éveil maximal.

Le Homard, lui, d'une cuisson juste, réveillé par l'acidité des fruits rouges : un peu détonnant et discordant au palais, mais on s'en moquera bientôt, puisque le consommé, d'une franchise aromatique impressionnante, impose le plat comme une évidence.

Le condrieu fait son travail.

Et le plat mythique, symbole de la maison, le Bar au caviar, est posé face à nous...Imaginez une pureté graphique totale : un fin pavé de bar de ligne nacré de grains de caviar d'Aquitaine et pris dans une écume laiteuse.

La cuisson impeccable, les associations heureuses. On plane.

 

 

 

 


Puis vient la volaille de Bresse moelleuse et savoureuse, habilement réchauffée par l'acidité du citron de Menton et la verdure des blettes; la texture et l'iode des couteaux contrebalancent le tout. Et avant même le dessert, on sait que l'on a déjà atteint les sommets. On applaudit à autant de justesse et de précision.

 

 

 

 

 

Le crémeux de Saint Félicien est riche en texture, délicatement relevé par ce poivre rare, et la griotte flatte le tout. On se laisse tenter par la sélection de fromages affinés, plus par gourmandise, il est vrai. Une assiette tournant autour de productions locales sur

un mode "chèvre/brebis" fera une parenthèse enchantée avant le sucré.

Les deux dessserts, le soufflé au Grand Marnier et les fraises travaillées à l'anis et montées façon guimauve terminent ce menu sur le même tempo à savoir, celui de l'excellence.

 

La vraie bonne idée aura été de laisser en consultation pendant le repas, sur un petit format, ce fameux menu Collection, ce qui permet de suivre l'évolution des plats.

 

La salle se vide peu à peu...Des conversations qui passent à nos côtés, on entendra "...stupéfiant...". Ce qualificatif pourrait résumer de manière efficace la cuisine d'Anne-Sophie Pic.

Le charme opère encore et toujours.

 

Un bas Armagnac 20 ans d'âge et une verveine pris sur la terrasse arborée viendront clore ce fabuleux voyage. Nos yeux brillent aussi fort que les 3 étoiles de cette cuisine légère et aérienne.

Une histoire de générations et surtout l'histoire d'un prénom.

 

 

 

19/20 pour la Maison Pic à Valence, dans quelques jours, nous parlerons dans un autre article de la table d'Anne-Sophie Pic au Beau Rivage Palace de Lausanne, où nous testerons le menu au déjeuner et le menu Actualités.

La précision sera-t-elle toujours au rendez vous de l'autre côté des Alpes...?

Réponse dans quelques jours...

 

 

 

 

 

 

 

 

Découvrez la playlist ASP Valence

 

 

 

 

 

Crédits photos

 photos salle du restaurant et plats sauf bar de ligne courtesy S.J



03/08/2010
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